Dans une ville où le temps se perd dans un labyrinthe administratif, Eddie Malone reçoit un appel de détresse d’un vieil ami. Face à une armée de salariés brisés par la malédiction des notes de frais, il va devoir sauver une entreprise au bord du chaos…Quels secrets se cachent derrière ces murs ? Et surtout, parviendra-t-il à leur redonner espoir avant qu’il ne soit trop tard ?
Sale temps pour les saisies inutiles…
Et puisqu’on parle de temps, c’était encore une de ces journées orageuses qui ne verrait pas le soleil se lever. Mon vieux chapeau ruisselait comme s’il pleurait toutes les larmes de cette foutue ville déprimée par la corruption et les crimes financiers…
Un éclair, presque instantanément suivi de son double sonore assourdissant, semblait me pousser avec insistance vers la porte du grand manoir sombre, qui s’ouvrait maintenant sans même m’avoir laissé le temps de m’annoncer.
« IL » devait m’attendre, bien sûr. Au téléphone, sa voix chevrotante m’avait supplié de rappliquer au plus vite, contrastant avec le personnage haut en couleurs et sûr de lui avec qui j’avais tant roulé ma bosse avant que tout ne foute le camp (Je vous ai déjà raconté ? ça se passe ici). « Question de vie ou de mort », qu’il m’avait presque crié… J’avais un mauvais pressentiment.
Sacré Chuck. Une fois sorti de ma zone d’influence néfaste, les choses avaient commencé à bien tourner pour lui : il était à la tête du département administratif et financier d’une PME spécialisée dans les services de filature, « Seek, Check & Co », et pour laquelle il s’occupait aussi de la gestion du personnel. Sous sa responsabilité, une cinquantaine de braves gars qui ne comptaient pas leurs heures. Pas une seconde à lui, un boulot stressant, mais il était respecté et semblait avoir enfin trouvé la quiétude. Alors qu’est-ce qui avait bien pu se passer pour le mettre dans cet état-là ? Je n’allais pas tarder à le savoir.
L’immense porte s’est refermée derrière moi dans un grincement sinistre interminable. Le temps de chasser vainement de ma main l’eau qui ruisselait de mon vieux manteau, mes yeux se sont ouverts sur un spectacle qui m’a glacé le sang. Le long couloir qui me séparait du bureau de mon vieil ami était devenu le théâtre d’un scénario de film d’épouvante, à marquer vos nuits et à les priver de sommeil pour le restant de vos jours :
Une horde de cadavres ambulants, emplissant le couloir, se pressait contre la porte du fond sur laquelle était inscrit en lettres d’or « Direction administrative et financière, gestion du personnel ». Sur le mur de droite on avait griffonné d’une écriture tremblante qui semblait faite de sang humain : « Rendez-nous notre temps ». Un peu plus loin, en face, était sommairement représentée une horloge sous-titrée des mots « TIC-TAC ». De plus en plus étrange…
Je dénombrais au jugé une cinquantaine de pauvres ères, gémissant, le visage déformé par la douleur, les bras tendus vers l’avant et se bousculant, semblant chercher à tout prix le salut de leur âme. Et apparemment, c’était derrière la porte du bureau de mon ami Chuck qu’ils pensaient le trouver…
Je les reconnaissais, ces pauvres types. Il y avait des agents de terrain, amorphes ; des gars de la compta, le visage déformé en un rictus de douleur ; des commerciaux, le costume trois pièces en lambeaux ; et même le brave Pete, du marketing, le regard vide, les yeux enfoncés dans leurs orbites. Tous des braves gars, qui avaient toujours apprécié Chuck, mais qui semblaient aujourd’hui vouloir désespérément en faire leur repas.
Mon ami était en danger. Il fallait que j’agisse, que je fasse quelque chose de bien, pour une fois. J’ai pris une grande inspiration, et je me suis frayé un chemin à travers la cohorte. Mes narines se sont emplies d’une odeur nauséabonde : celle du désespoir mêlé à la colère. J’ai retenu un violent haut le cœur et j’ai cessé de respirer, tout en continuant d’avancer. Ce couloir semblait interminable. Certains m’agrippaient, suppliants, mais j’arrivais à m’extraire et à gagner du terrain, mètre par mètre. Aurais-je assez d’air dans les poumons pour atteindre la porte ? Il ne restait plus que quelques mètres. Ma poitrine brulait et me hurlait de laisser entrer l’air. Pas question. Alors que ma vue commençait à se brouiller, je jetais toutes mes forces dans un ultime geste pour écarter les derniers corps de mon chemin. Mes poings serrés tambourinaient maintenant à la porte, alors que je ne me souvenais pas leur en avoir donné l’ordre. Ma bouche s’est ouverte et à expulsé tout l’air accumulé dans un hurlement sinistre :
— Chuck ! Ouvre ! c’est moi ! Dusty !
La porte s’est ouverte. Ma vue s’est brouillée, j’ai basculé vers l’avant, heurté le sol de la tête, puis plus de son, plus d’image. Blackout.
Je suis revenu à moi brusquement. Des sels. Ça m’a remis rapidement les idées en place. Quand ma vue s’est accommodée, j’ai aperçu, beaucoup trop près de mon visage, celui de mon vieil ami, me fixant, le regard en panique. J’ai écarté brusquement en arrière le fauteuil dans lequel j’étais assis, reprenant cette fois entièrement mes esprits.
— Qu’est-ce que c’est que ce bordel, Chucky ?
Il m’a fixé, apparemment incapable de prononcer le moindre mot, les yeux brillants, les lèvres tremblantes. Puis, comme pour libérer une tension trop longtemps accumulée, il a éclaté en sanglots.
— Dusty, mon vieil ami… si… si tu savais…
Il avait du mal à reprendre son souffle. Il sanglotait violemment. J’ai attrapé la bouteille de scotch qui dépassait d’une montagne de papiers entassés sur son bureau, et je lui ai rempli un verre. « Jamais plus haut que le bord, qu’il avait l’habitude de me dire ». Cette fois il n’a rien dit. Il l’a attrapé sans se faire prier et l’a vidé d’un trait. Il a toussé longuement, comme pour exorciser toute sa peur, puis il a claqué le verre sur ce qui devait être le seul espace visible de son bureau (comment diable pouvait-il travailler sous un tel amas de paperasse ?). Ses mains jointes, tordues par le stress, tremblaient, mais sa voix avait repris un semblant d’assurance.
— C’est affreux. Ils ne s’arrêteront que… quand je leur aurai rendu…
— Rendu quoi ? De quoi parles-tu, vieille canaille ?
— LE TEMPS… le temps qu’ils ont perdu ! Tu comprends ? Tout ce temps !!!
Il semblait perdre la raison. Je l’ai attrapé fermement par les bras et je l’ai secoué énergiquement en le regardant droit dans les yeux :
— Qu’est-ce que tu as fait ? Je ne comprends rien ? Réponds à la fin !
Il s’est calmé. Dans une expiration qui aurait pu porter le poids du monde, il a baissé les yeux et a commencé à tout déballer.
— Les notes de frais. Ils en font tous les mois. TOUS !
Il s’est laissé tomber lourdement dans son énorme fauteuil en cuir marron, usé par un nombre d’heures de travail bien trop important. Il avait le regard dans le vide, mais il continuait :
— Des restaurants, du matériel, une course en taxi… La vie d’une entreprise, tu vois… Alors évidemment, chaque mois je leur demande de remplir une note de frais et d’y attacher les justificatifs.
Son regard a semblé effectuer une mise au point vers quelque chose de concret : son bureau (car il y avait bien un bureau sous tout ce fatras). Il est sorti brusquement de sa torpeur, agrippant brusquement ce qui avait été autrefois des cheveux :
— Regarde mon bureau ! ces piles de notes de frais qu’il faut encore que je traite !
Pendant un instant, j’ai cru qu’il allait se mettre à pleurer. Mais il s’est retenu.
— Tu imagines tout ce que je dois saisir en comptabilité ? Je n’arrive plus à m’y retrouver ! Et bien souvent, les montants ne correspondent pas avec ceux des justificatifs !!! Tu entends ?! J’ai l’impression de devenir dingue !
De ses yeux écarquillés se dégageait effectivement une impression de folie.
— Du calme mon vieux, redescends un peu, veux-tu ?
— Excuse-moi.
Il s’est calmé un instant.
— Je me plains, mais c’est pas le pire. Le problème, c’est EUX !
Il pointait la porte du doigt. J’avais presque oublié le bruit incessant des poings qui cognaient contre la vitre opaque.
— Ils sont comme moi : ils n’en peuvent plus… ils doivent tout taper à la main, imprimer, agrafer les justifs, ne pas oublier la TVA, et bien souvent quand ils me rendent leur note de frais, c’est avec une semaine de retard et des erreurs de saisie ou de calculs qui les obligent à tout recommencer… L’autre jour, tiens, Joey-la-planque, tu sais, mon meilleur agent de terrain : je l’ai croisé dehors, en arrivant le matin, assis en boule, la tête entre les genoux. Comme d’habitude dans cette foutue ville, il y avait un vent à décorner les bœufs. Tout autour de lui, des dizaines de petits papiers volaient, se dispersaient au gré du vent, il y en avait partout, je te dis… Trois mois qu’il les accumulaient dans son portefeuille, en attendant de dégager du temps pour s’en occuper. Il n’aura plus jamais l’occasion de le faire…
Il a fait une pause. Il semblait exténué. Je dirais qu’il avait pris… 15 ans, depuis les 3 semaines qui séparaient notre dernière rencontre. Pauvre vieux.
— Tous ces braves gens, là, dehors. Ils ont tous une histoire abominable du même genre à raconter. Ils travaillent dur, tu comprends ? Ils n’ont plus le temps de saisir tous ces chiffres. PLUS LE TEMPS. Ça les rend fous, et moi je dois expliquer au Big Boss pourquoi la productivité est en baisse. Ça… ça peut plus dur…
Sa voix s’est brisée et il a laissé échapper un sanglot à peine refoulé.
Il était en train de craquer. Il fallait que j’agisse. Cette perte de productivité avait déjà fait bien trop de victimes. Le temps perdu, voilà ce qui avait transformé d’honnêtes et courageux employés en ombres morbides et vides.
J’ai su alors ce qu’il me restait à faire : déclencher l’opération Zéro Saisie. Le temps était compté, il me fallait agir vite. J’ai pris le visage joufflu de mon ami entre mes mains, je l’ai regardé droit dans ses yeux gonflés :
— J’ai ce qu’il te faut mon vieux, ressaisis-toi. Ça ne coute pas cher, c’est rapide à mettre en place, et je te garantis qu’en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, tu auras des résultats concrets, pour toi et tes gars. Tout ce que tu as à faire, c’est de me faire confiance.
J’ai vu l’espoir dans ses yeux. Une petite flamme s’était allumée et lui donnait un semblant de contenance.
— Tu as carte blanche, Dusty.
Il ne m’en fallait pas plus :
— Tu as un téléphone ?
D’un revers de main assuré, il a débarrassé une partie de son bureau d’une quantité impressionnante de feuilles qui ont volé à travers la pièce, et a révélé un combiné que je me suis empressé de décrocher. J’ai composé le numéro de mon contact à la LD*. Sans même laisser le temps d’une sonnerie, une voix s’est fait entendre :
— Ligue Digitale, j’écoute.
J’ai enclenché le haut-parleur. Chuck s’est redressé sur son siège, à l’écoute. Il semblait excité maintenant.
— Agent Eddie Malone, j’ai besoin de vos services. En urgence. Démat des notes de frais. Protocole Zéro Saisie. Manoir Seek, Check & Co. Terminé.
— Bien reçu agent Malone. Prise en main à distance requise. Veuillez transmettre le code.
J’ai masqué le micro du combiné de ma main libre et j’ai demandé à Chuck :
— Tu as reçu un code. Vérifie tes mails.
Il a soulevé un dossier de son bureau pour révéler un clavier, sur lequel il s’est mis à tapoter. Après avoir chaussé ses lunettes de lectures, il a fixé son écran et m’a transmis le code, que j’ai répété à voix haute dans le combiné.
— Veuillez patienter je vous prie…
Trois bips successifs, puis :
— Installation effectuée. Dématérialisation des notes de frais opérationnelle. Avez-vous d’autre questions ?
J’ai raccroché.
— A toi de jouer mon vieux.
Mon travail ici était terminé. Je me suis levé, j’ai mis les mains dans les poches, et sans un regard, je me suis dirigé vers la porte-fenêtre de la terrasse. Hors de question de traverser de nouveau ce fichu couloir.
— Dusty ! Attends !
Je me suis arrêté, toujours sans me retourner, une main sur la poignée.
— Je fais quoi, moi, maintenant ? Tu me laisses comme ça ? Avec tous ces gars dehors qui veulent ma peau ?
— Tu n’as plus besoin de moi, old pal. Tout est automatisé maintenant. Un jeu d’enfant.
J’ai tourné la poignée et ouvert la porte. Il ne pleuvait plus.
— Ah. Et fais-moi plaisir : met un peu d’ordre sur ce bureau.
Et je suis parti. J’adore soigner mes sorties.
***
Quelques jours plus tard. Une sonnerie de téléphone retentit et me vrille la tête depuis plusieurs minutes interminables. J’ai encore dormi dans mon bureau… pas assez longtemps. Mon tourmenteur à l’autre bout du fil va bien finir par se lasser et lâcher sa proie…
Il ne se lasse pas. Je me lève péniblement et me traine lentement jusqu’à la sonnerie.
Je décroche, sans dire un mot. Dans le combiné, un souffle rapide et bruyant, chargé d’excitation.
— Dusty ? T’es là ? C’est Chuck.
Il semble surexcité. Je l’imagine se tortiller bruyamment sur le cuir épais de son fauteuil de bureau.
— Alors, mon vieux. Tu as réussi à ravoir la peinture dans le couloir ?
— C’est un miracle Eddie. Je ne sais pas par où commencer !
— Commence par reprendre ton souffle et desserrer ta cravate, tu vas nous faire une syncope. Raconte.
— Tout est rentré dans l’ordre. Non attends. Mieux que ça. Tout a changé.
Il fait une pause, comme pour rassembler ses idées.
— Ça marche tout seul. Les notes de frais ! Les gars n’ont plus qu’à prendre une photo de leur justificatif, et la note est remplie automatiquement, avec la TVA, et tout ! En moins de 5 minutes, c’est bouclé pour eux ! Si tu voyais le temps qu’ils gagnent et à quel point ils ont retrouvé leur joie de vivre et leur motivation…
Sa voix tremble d’émotion. C’est pénible.
— Je te l’avais dit. Et toi dans tout ça ? Tu as de nouveau le temps de te faire des nouilles instantanées le midi ?
— J’ai gagné un temps précieux ! Je reçois les notes de frais par mail, je n’ai plus qu’à les valider, elles passent en compta et en paie en 3 clics, et hop ! Archivées au format légal. Et ce n’est pas tout : je gagne énormément en fiabilité !!!
Il parle trop. Trop vite. Trop fort. Je n’aurais pas dû finir cette bouteille hier soir…
— Du calme mon vieux…
— C’est comme je te dis : figure-toi qu’il n’y a plus d’erreur de saisie, donc plus d’allers-retours permanents. Plus d’erreur de TVA. Et mes règles d’engagement sont appliquées à la lettre : selon le profil, une alerte remonte en cas de dépassement des plafonds, par exemple.
Il crie presque, maintenant. C’était trop.
— C’est bon, j’ai compris, pas besoin de t’exciter comme ça, pense à ton cœur : TU gagnes du temps, ILS gagnent du temps, et tout le monde gagne en fiabilité. Affaire classée.
— Toi alors… tu vas toujours droit au but, hein ? En tous cas mon bureau est rangé maintenant. Plus de papier. Tu viens boire un scotch quand tu veux.
— J’ai arrêté…
Et je raccroche.
Il m’a épuisé, mais je suis heureux d’avoir pu aider. Un pas de plus vers la rédemption. Le chemin est encore long…
A l’occasion, il faudra que je lui explique qu’il peut gagner encore plus de temps avec la démat des factures d’achat et l’automatisation des process comptables. Avec la relance automatisée des créances. Et même avec la facture électronique, tiens.
Mais ça… c’est une autre histoire…
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